
Que faire quand on ne sait pas à quoi ressembleront les conditions-cadres dans une semaine, et encore moins l’année prochaine ? De nombreuses entreprises sont précisément confrontées à cette question après les menaces douanières du président américain Donald Trump. Dans cette phase d’incertitude, l’IMD montre avec son Future Readiness Indicator quelles sont les entreprises les mieux préparées aux futurs défis de ce monde.
Howard Yu, Professeur de management et d’innovation à l’IMD, considère que deux facteurs sont décisifs pour la pérennité des entreprises : “L’agilité et la patience technologique ! Avec l’agilité, on reconnaît les nouvelles conditions, on change de direction, on optimise la politique commerciale. La patience technologique est le contraire. On garde les finances saines pour financer au bon moment des expériences numériques intelligentes”. Donc d’une part réagir rapidement, d’autre part investir de manière très ciblée dans la technologie comme l’informatique et l’IA, c’est la recette du succès pour être prêt pour l’avenir.
Dans la première partie du Future Readiness Indicator 2025, l’IMD a étudié trois industries : la Finance, l’Automobile et les Biens de Consommation Emballés (« Consumer Packaged Goods »). C’est justement dans le domaine des “Consumer Packaged Goods”, comme on appelle cette catégorie en anglais, qu’Howard Yu voit, malgré quelques difficultés ces dernières années, la capacité de Nestlé, acquise au cours de nombreuses années, à performer même en période imprévisible. “Lorsque des phases récessives menacent, beaucoup de gens renoncent aux produits de marque chers et s’en tiennent à des imitations bon marché”, explique le Professeur de l’IMD, “Mais Nestlé a massivement augmenté ses dépenses de marketing, et cela a déjà des effets positifs”. De plus, le changement de CEO et de stratégie “Retour aux sources” de l’année dernière crée plus de prévisibilité, également pour les investisseurs. Mais, et c’est là la difficulté, “cela crée certes plus de stabilité, mais devrait se faire à long terme au détriment de l’innovation”.
Les meilleurs résultats dans cette catégorie sont obtenus par L’Oréal, Coca-Cola et Unilever. Nestlé fait partie du groupe de tête élargi avec une cinquième place.
Une multinationale suisse obtient également de bonnes notes dans le domaine financier : Zurich Insurance qui occupe la 8ème place, derrière les grands émetteurs de cartes de crédit Visa et Mastercard et les meilleures banques comme DBS de Singapour, mais devant son grand concurrent, le groupe Allianz. “Avec Zurich Insurance, on voit comment des décisions de portefeuille claires, comme celle d’opter pour des activités moins gourmandes en capital, augmentent la rentabilité à long terme”. Zurich en profite aujourd’hui, même avec une force de capital incroyable. Le Professeur Yu estime en outre que Zurich Insurance est bien positionnée grâce à la diversification géographique et à la gestion ciblée des assurances spécialisées, où l’on peut demander des primes plus élevées.
Selon le Future Readiness Indicator de l’IMD, l’avenir s’annonce moins positif pour UBS (20ème), Swisslife (29ème) et SwissRe (31ème). Pour UBS, il est frappant de constater que sa réputation a souffert, surtout sur le marché national, et qu’elle est presque tombée au niveau du Crédit Suisse. “Pourtant, l’intégration du Crédit Suisse se passe bien, même le risque principal, l’informatique, semble être maîtrisé, comme l’a montré un essai pilote en Asie fin 2024”, selon Howard Yu. Et à l’échelle mondiale, UBS reste manifestement une adresse attractive, comme le montrent les afflux de capitaux. Il est important de pouvoir rétablir la confiance sur le marché domestique suisse, “mais quelques campagnes de marketing ne suffisent pas”. Là où Zurich Insurance peut générer des bénéfices élevés grâce à une situation confortable et à de belles recettes de primes, UBS et d’autres instituts financiers suisses doivent d’abord faire leurs devoirs pour rester viables.
Un changement en tête du Future Readiness Indicator a eu lieu chez les constructeurs automobiles : le constructeur chinois BYD (Build Your Dreams) a dépassé Tesla. L’entreprise américaine a été en tête de la catégorie pendant des années. Mais la position forte de BYD sur l’ensemble de la chaîne de création de valeur, y compris la fabrication de batteries, s’avère payante. Les deux entreprises sont toutefois confrontées au même défi pour des raisons différentes : comment (re)gagner le cœur des clients.
Tesla a perdu de nombreux sympathisants à travers le monde à cause des excès politiques de son CEO Elon Musk. Cela va plus vite que de les regagner. De son côté, BYD est confronté à la difficulté de gagner la sympathie des clients potentiels en dehors de la Chine. “Comme les Japonais autrefois avec Sony et Toyota, les Chinois doivent encore apprendre ce qui motive les clients en dehors de leur culture”, explique Howard Yu. Il ne s’agit plus de gadgets comme un juke-box dans le système de divertissement, mais de tout autres caractéristiques comme la sécurité et la fiabilité. “Pour cela, les fabricants chinois doivent d’abord s’adapter à la culture de l’Allemagne, de la France ou de la Suisse s’ils veulent réussir”, poursuit Howard Yu. Les constructeurs automobiles européens de longue date ont une position difficile : “Nous allons assister à une forte consolidation”, prédit le professeur de l’IMD. Un signal d’alarme donc, également pour les sous-traitants automobiles suisses.
Le Future Readiness Indicator se base sur des données d’entreprises accessibles au public et les analyse dans sept catégories : données financières clés, attentes des investisseurs en matière de croissance future, diversité des entreprises et des collaborateurs, recherche et développement, innovation et gestion de la trésorerie et de la dette. La deuxième partie du Future Readiness Indicator sera publiée le 25 novembre 2025 et analysera les secteurs pharmaceutique, tech et lifestyle/fashion.